Echange au Mas de Mingue

Vendredi 30 janvier au Mas de Mingue à Nîmes, Christophe Cavard a souhaité rencontrer le Président et l’Imam de la mosquée, ainsi que certains acteurs sociaux, éducatifs, associatifs, sportifs et le comité de quartier. Il s’agissait d’écouter comment ces responsables locaux vivent tous les jours dans le quartier depuis les événements tragiques de ce début d’année. Une série de rencontres sont prévues pour faire le lien entre réalités locales et travail parlementaire.

Les principaux éléments partagés sont:

– une forme de désarroi vis à vis de la stigmatisation des musulmans et l’usage ou le choix des mots dans le traitement des événements.

L’inquiétude est perceptible chez ces responsables associatifs, « comment encore parler d’intégration? derrière ce mot se pose la question de l’acceptation ». Nombre des acteurs de terrain au Mas de Mingue sont issus de l’immigration, nés sur le territoire et citoyens Français. Ils ont étés à l’école de la République, y ont fait des études, y travaillent et y ont fondé leurs familles. Ils témoignent que  la peur existe dans le quartier et qu’on regarde les musulmans différemment ces derniers temps.

M. Badaoui, le Président de la mosquée  réaffirme : «  On ne cautionne pas ce qui se passe. Nous sommes avant tout des citoyens français, être musulman n’est pas un passeport. En ce moment le Coran est en rupture de stock parce que  les gens veulent savoir ce qu’il y a dedans. Il y a plus d’un milliard et demi de musulmans dans le monde, c’est une religion universelle, pas arabe. Il ne faut pas faire de mélange entre terrorisme et Islam ».

Christophe Cavard rapporte que la question des prêches qui  se font la plupart du temps en arabe fait débat  à l’assemblée nationale. Les députés pensent qu’il faudrait que les Imams soient bilingues. Ce à quoi Mr Badaoui  répond qu’une journée avant, le prêche est traduit et que l’Imam de la mosquée du Mas de Mingue prend des cours de Français.

Au sujet de la radicalisation de certains jeunes, il semble difficile d’en repérer des les signes en amont, « cela se passe beaucoup sur internet et ce ne sont pas les signes extérieurs tels que vêtements, voile ou barbe qui identifient des candidats au Djihad ». Tous disent avoir mal, car ce sont des petits frères qui partent, bien souvent parce qu’ils sont manipulables et donc manipulés.

– L’échec est-il collectif ?

Les jeunes ne trouvent pas de travail, ils vivent plus l’échec scolaire et ont moins accès à la formation professionnelle, l’état de certains logements collectifs, le manque de moyens pour l’accompagnement social, une police qui est parfois intrusive et vexatoire face aux jeunes du quartier, la démission éducative de certaines familles dépassées souvent mono-parentales….beaucoup d’éléments qui favorisent la désespérance et le manque de repères.

Christophe Cavard interpelle sur son rôle dans le cadre la mission parlementaire qui travaille sur ces questions, en lien avec le réel vécu ici, et les propositions à formuler ensemble. Par exemple, est ce que le retour d’un service obligatoire est une bonne idée ou non ? Les avis sont partagés, certains s’interrogent sur le bien fondé d’un retour au service militaire et  de l’apprentissage des armes. Mais un service civil pourrait offrir l’opportunité de vivre la mixité sociale et de donner du sens à son action dans l’expérience d’une activité au service de la communauté, reconnue et validée par une «indemnité ».

– L’éducation passe par l’échange et ces responsables associatifs le savent bien.

La minute de silence, qui à quelques exceptions a été respectée, fut aussi l’occasion d’entendre les amalgames faits par des jeunes à propos de la liberté d’expression, de leur incompréhension de la différence à pouvoir s’exprimer selon que l’on se vit Charlie ou Dieudonné, de la Shoah mise en balance avec ce que vit le peuple palestinien… Des sujets que tout le monde n’est pas à même de traiter à chaud sans les maîtriser vraiment, pour lesquels une formation spécifique des enseignants et des éducateurs pourraient les aider, car ils ne les abordent pas forcément dans leur formation initiale.

Christophe Cavard émet l’idée de la création et de l’embauche de « brigades d’éducateurs » solidement formées à accompagner et à détecter les problématiques en lien avec tous les acteurs de cohésion sociale et la communauté éducative. Dans le quartier, le maillage associatif  existe bel et bien et les associations parlent entre elles.

Cette rencontre fut riche d’expression, d’où est ressortie l’idée de mutualiser un poste de secrétariat pour renforcer  les associations qui agissent au Mas de Mingue. Pour clore cet échange, celles qui étaient représentées ont  formulé le souhait d’organiser plus fréquemment des rencontres entre elles pour accroître les échanges sur un temps dédié.

Midi libre du 1er février 2015

ML 1er fevrier

 

 

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