Loi formation professionnelle, démocratie sociale, emploi: des avancées à conforter
Mercredi 26 février, Christophe Cavard intervenait en séance pour le groupe écologiste sur le texte final issu des débats parlementaires à l’Assemblée nationale puis au Sénat, et de la Commission Mixte Paritaire (CMP).
Auparavant il était intervenu, en commission des affaires sociales, puis à l’ouverture des débats de l’Assemblée nationale le 5 février pour faire valoir les attentes des écologistes sur ce texte qui nécessitait des évolutions, notamment de reconsidérer les modalités de réforme de l’inspection du travail, qui selon eux n’avait pas sa place dans cette loi : voir son intervention
Pour mener ces travaux parlementaires, Christophe Cavard s’est appuyé sur la journée de travail d’élus régionaux ou locaux écologistes qui s’est tenue à Lyon le 24 janvier.
Le dossier de présentation de la loi: DP_loi_Formation_professionnelle_emploi_democratie_sociale_6mars2014
26 février 2014
Monsieur le ministre,
Madame la présidente de la commission des affaires sociales,
Madame et messieurs les rapporteurs,
Mes chers collègues,
Nous voici arrivés au bout de l’examen marathon d’un projet de loi important visant à réformer, en 3 semaines, la formation professionnelle et la démocratie sociale!
La démocratie parlementaire est bousculée au rythme ou s’enchaînent les propositions de loi pour améliorer les droits des salariés et l’accès à l’emploi. Ces derniers jours nous avons fait progresser la lutte contre le dumping social, le soutien à l’économie réelle face à la finance, le statut des stagiaires. Dès le mois d’avril nous examinerons le projet de loi sur l’économie sociale, cher aux écologistes en raison du mode de fonctionnement des employeurs de ce secteur, au sein duquel un homme, une femme égal une voix.
Car, renforcer la démocratie sociale, c’est réaffirmer notre engagement pour une citoyenneté active, au sein de l’entreprise comme dans la cité, la participation des salariés, l’innovation et l’initiative. C’est garantir les contre-pouvoirs au-delà de la seule intervention de l’Etat, c’est aussi garantir la loyauté des négociations. Ce sont non seulement des valeurs démocratiques que nous affirmons ici, mais au-delà c’est une question de pragmatisme.
Car lutter contre la finance et le sentiment d’impuissance c’est aussi donner des moyens et du pouvoir d’agir aux salariés, aux petites entreprises, aux coopératives, aux artisans, … aux humains face aux capitaux.
Je salue le travail parlementaire de qualité que nous avons mené ici.
C’est dans un climat constructif que le projet de loi a évolué de manière positive, et que certaines positions portées par les écologistes ont pu être intégrées au texte. J’en profite pour remercier le rapporteur, mon collègue Jean-Patrick Gille, qui a fait un remarquable travail collectif de coordination et de fond sur ce texte, malgré le rythme soutenu.
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Pour entrer dans le vif du sujet, je commencerai par l’élément central de ce texte, l’avancée principale: la création du compte personnel de formation. Toutes et tous ici nous nous en sommes félicité: le compte personnel de formation constitue une avancée vers la mise en place d’un droit universel à la formation universelle tout au long de la vie, que nous défendons: directement rattaché à la personne, il l’accompagne pendant toute sa vie professionnelle.
Mais nous avons également, depuis le début des discussions, pointé de manière unanime que 150h ne permettent pas d’accéder à une formation qualifiante. C’est pourquoi les écologistes ont défendu, dès le départ, la possibilité d’ouvrir une renégociation de ce volume horaire par conventions de branche.
Nous avons débattu de cette possibilité ici même, et nos collègues sénateurs y ont partiellement répondu. Nous nous félicitons également que le plancher des 150h puisse être obtenu en 7 ans plutôt qu’en 9 ans.
Les écologistes ont été également très attentifs à une meilleure prise en compte des publics cibles, notamment en rendant le compte personnel de formation plus équitable envers les demandeurs d’emploi, les salariés à temps partiel, en insertion, et à bas niveau de formation initiale.
Nous avons pour cela porté de nombreux amendements et obtenu des possibilités d’abondements supplémentaires fléchés vers trois catégories de publics prioritaires : les salariés exposés à des facteurs de pénibilité, les salariés menacés par des évolutions économiques ou technologiques, et les salariés à temps partiel. L’accord trouvé en Commission Mixte Paritaire lundi dernier renforce cela.
Par ailleurs, rapport au texte initial, il était indispensable que les droits soient ouverts à des publics supplémentaires, tels que les intermittents du spectacle et les travailleurs d’établissements et services d’aide par le travail. C’est chose faite, ces publics pourront bien bénéficier du compte personnel de formation. L’étape suivante est d’en ouvrir l’accès aux fonctionnaires.
Sur un autre sujet, celui du service public de la formation professionnelle, et alertés par l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, nous avons défendu une sécurisation de leurs biens immobiliers. Nous avons été entendus et l’AFPA reste ainsi un centre de formation au statut particulier, et à ce titre protégé des logiques parfois mortifères de la concurrence.
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Par ailleurs, ce texte prend les devants de la prochaine loi de décentralisation que nous examinerons bientôt.
Les écologistes sont convaincus que la région est le bon échelon pour développer et traiter des problématiques d’orientation, de formation et d’emploi. Ce projet de loi prend en compte la notion de territoires et de bassins de vie, et aussi la mobilité choisie des individus.
La future loi de décentralisation devra prendre en compte cette réalité des compétences des régions, et procéder à une réforme fiscale permettant à celles-ci d’accéder à une autonomie financière.
Ici aussi, les débats parlementaires ont permis de clarifier leur rôle, notamment ses compétences pour de nouveaux publics, comme les personnes en situation de handicap.
Le rôle de la Région doit être affirmé au niveau de l’emploi et de la formation, ce que les écologistes ont défendu en proposant d’en faire l’acteur principal des formations collectives pour les demandeurs d’emploi, y compris celles proposées par Pôle Emploi. Lundi, en Commission Mixte Paritaire nous apportions un éclaircissement bienvenu actant que Pôle emploi devra passer une convention avec la Région pour l’achat de formations collectives.
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En lien avec cette volonté décentralisatrice, les écologistes défendent également un renforcement des outils territoriaux de gouvernance partagée. Ainsi, pour permettre une vraie diversité et une bonne représentativité au sein des instances régionales et nationales, nous avons porté la nécessité d’ouvrir le droit de participer et d’accéder aux dispositifs de financement à l’ensemble des acteurs locaux.
A ce sujet, le deuxième volet du texte sur la démocratie sociale a lui aussi bien évolué pendant les débats parlementaires. Tout d’abord, l’entrée des acteurs dits du « hors champ », c’est-à-dire ceux des secteurs de l’économie sociale et solidaire, l’agriculture ou les professions libérales, qui fédèrent un tiers de l’activité économique et des emplois en France, trouvent enfin leur place dans les instances de l’emploi, de l’orientation et de la formation.
Si nous approuvons la volonté de s’appuyer sur le dialogue social, et donc sur les négociations entre partenaires sociaux, il faut aller plus loin en ce sens.
Pour cela, et surtout pour que cette méthode soit efficace et équitable dans les accords conclus, il est indispensable que le nombre de salariés syndiqués évolue. Nous avons redonné sa force au dialogue social. Cela devrait permettre le renforcement du syndicalisme.
La démocratie sociale n’est cependant qu’un des piliers d’une démocratie active, vivante, innovante et inclusive. Si la démocratie institutionnelle est bien entendu nécessaire à la décision publique, nous devons soutenir la démocratie participative « 2.0 ». En effet celle-ci s’essouffle aujourd’hui car elle n’est pas suffisamment prise au sérieux malgré les efforts que déploient ses militants et acteurs. La décentralisation implique nécessairement de renforcer sa pratique, car les bonnes idées ne viennent pas toujours d’organisations corporatistes…
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Par ailleurs, la formation professionnelle doit être un levier pour l’adaptation aux changements et aux besoins de la société. Nouvelles technologies ou techniques, nouveaux modes d’échanges, nouvelles filières, nouveaux métiers : la formation professionnelle est à la fois une opportunité d’émancipation individuelle, mais également une manière d’anticiper les transitions.
Je le disais lundi soir, ici même, pour la proposition de loi sur l’économie réelle: nous devons réorienter nos modes de productions vers les circuits courts, vers la sobriété énergétique, vers des modes de production et de consommation plus soutenables.
Nous devons également restaurer le lien social, apprendre à vivre mieux ensemble et pour cela renforcer l’éducation, l’animation, le soin apportés aux plus fragiles.
Dans ce cadre, les activités que nous devons favoriser doivent être socialement utiles. Ce sont celles des filières d’avenir que nous répétons à chaque texte, mais aussi l’éducation, la santé. La formation professionnelle a plus qu’un rôle à jouer, elle a la responsabilité d’accompagner ces mutations et cette transition écologique. Les amendements de mon collègue Denis Baupin vont dans ce sens, leur adoption est une avancée significative.
Pour cela, la dimension qualitative est évidemment fondamentale. Le texte final renforce cette exigence, en intégrant la qualité des actions de formation dans le code du travail, en posant « l’exigence pour les financeurs publics et paritaires de la formation professionnelle de s’assurer de la capacité des prestataires de formation à réaliser une formation de qualité ». C’est un enjeu pour lequel les régions devront s’impliquer.
Les écologistes ont défendu la volonté de mettre la formation professionnelle au service de la transition écologique. Nous avons été entendus, dans une certaine mesure, à travers l’adoption de certains de nos amendements. Maintenant, cette position doit continuer à être portée dans les Régions, nous y serons vigilants.
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Enfin bien entendu, nous nous félicitons que le volet qui concerne l’inspection du travail n’ait pas été réintroduit en Commission Mixte Paritaire suite à sa suppression au Sénat. Nous avions, depuis le début, exprimé notre désaccord et nous avions ici voté contre l’article 20 en première lecture. On ne peut pas valoriser et utiliser la méthode du dialogue social et passer outre les inquiétudes des inspecteurs du travail. Il est nécessaire de prendre le temps d’une vraie discussion avec eux pour une réforme qui les concerne directement.
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Cette loi est un premier pas indispensable et comporte des avancées dans plusieurs domaines. Dans un moment où les parcours professionnels se font parfois chaotiques, les temps entrecoupés sans emploi doivent permettre de se former afin de pouvoir se reconvertir.
Il nous faut continuer dans cette direction, et aller plus loin vers la construction d’un droit universel à la formation tout au long de la vie. Nous en reparlerons à l’occasion des prochaines propositions de lois, celles sur la décentralisation, l’économie sociale et solidaire et bien entendu la transition énergétique pour laquelle, vous l’aurez compris, nous avons de fortes attentes.
Les écologistes voteront favorablement ce texte.
Je vous remercie.