Roms: de l’humanitaire à la politique

L’évolution de la situation des familles Roms de Nîmes: une urgence humanitaire

Alerté par le Collectif « Solidarité Roms » en mai 2013 sur les conditions de vie des familles Roms installées route de Saint Gilles, j’ai rencontré pour la première fois ces familles le 30 mai lors d’une visite sur le campement.
Cela m’a conduit à participer au comité de suivi mis en place par la Préfecture, avec une bonne connaissance de la situation. Ce comité, réunissant l’ensemble des intervenants associatifs ou institutionnels a engagé des mesures de première nécessité.

Une dotation exceptionnelle a été demandée auprès du Ministère de l’Intérieur, une enveloppe de 50 000€ a été débloquée pour compléter le diagnostic social et mettre en place un accompagnement renforcé des familles, réalisés par la Croix Rouge, conformément à la circulaire d’août 2012.

Ces interventions ont permis de procéder à un état réel de la situation et d’individualiser les actions selon les besoins des personnes. Par exemple, un suivi médical a été mis en place, la scolarisation des enfants a été rendue effective notamment par la gratuité des transports financée par l’Etat (et non par la Mairie de Nîmes) et la mobilisation de l’éducation nationale pour l’accueil des enfants dans une classe spécialisée au collège La Révolution, une action pour l’insertion professionnelle des adultes a été réalisée avec la proposition d’accès à des contrats aidés.

Toutefois, aucune solution durable n’avait pu alors être trouvée.

Jeudi dernier, les familles ont dû déménager, le terrain d’origine devant être récupéré suite à une décision de justice datant de début 2013, et par ailleurs étant devenu invivable.

Je me suis rendu lundi dernier, avec des membres de la croix rouge et du collectif solidarité roms, sur le terrain sur lequel vivent actuellement ces familles. Ce terrain est la propriété de la société Ocvia qui tolère son occupation, suite à ma demande relayée par la Préfecture.

J’ai constaté, suite aux intempéries, les très mauvaises conditions dans lesquelles vivent ces huit familles.

J’ai immédiatement rencontré le Préfet afin de mettre en place des mesures d’urgence :
– Aménagement du chemin pour rendre accessible le terrain (réalisé par la société Ocvia)
– Terrassement pour stabiliser le sol (réalisé par la société Ocvia)
– Mise en place de sanitaires, d’une citerne d’eau, de tentes ou de marabouts (Croix Rouge)
– Fournitures de denrées alimentaires et de bouteilles d’eau potable (Croix Rouge)
– Soutien à la scolarisation des enfants, avec un transport provisoire organisé par la Croix Rouge
– Suivi sanitaire et social par le Conseil général
– Containers à ordures par Nîmes Métropole

En parallèle, une recherche de solutions pérennes et individualisées est mise en place. Des réponses concrètes ont été trouvées pour quelques familles (logements).

J’ai saisi le Ministère du logement qui depuis est en lien permanent avec la Préfecture. Des rencontres partenariales ont lieu quotidiennement, un comité de suivi est mis en place afin de mobiliser l’ensemble des acteurs concernés : institutions, associations, collectivités, bailleurs sociaux, élus, partenaires privés …

Je souhaite une résolution rapide et humaine de la situation, sans débordements ni instrumentalisation politicienne de ce sujet sensible. Je continuerai de m’impliquer ainsi.

 

La situation des Roms en général: un engagement politique

Aujourd’hui, en France, vivent entre 15 et 20 000 roms, originaires en majorité de Roumanie ou de Bulgarie. Ces personnes ont quitté leur pays d’origine pour fuir les traitements discriminatoires qu’elles y subissent, auxquels s’ajoutent des raisons économiques. Et c’est bien de cela dont il s’agit : des personnes qui cherchent à assurer la sécurité physique et matérielle de leur famille. Qui pourrait le leur reprocher ? Mais contrairement à de nombreuses idées reçues, ce ne sont pas des nomades, il s’agit de personnes sédentaires qui cherchent à s’installer durablement dans un territoire. Comment peut-on encore imaginer que les familles installées à Nîmes depuis près de 10 ans, qui ont inscrit leurs enfants à l’école et au collège, qui ont entamé des démarches pour trouver un emploi, refusent de s’intégrer ?

Aujourd’hui, leur volonté n’est pas en cause, mais leurs conditions de vie ne sont pas favorables à une intégration immédiate : comment des adultes peuvent rechercher un emploi sans accès à l’eau potable, permettant des conditions d’hygiène minimales ?
 
Ces conditions de vie extrêmement précaires ne permettent pas d’assurer un accompagnement social de qualité garant d’une insertion sociale et professionnelle.
 
Les associations et collectifs présents proposent des réponses humanitaires à l’urgence, pour garantir à ces personnes non pas plus que ce que les autres citoyens, mais le minimum vital qui leur permette de vivre dans la dignité.
 
C’est indispensable, mais cela s’avère aujourd’hui insuffisant. Les solutions proposées doivent désormais être pérennes.
 
Dans les années 60, le gouvernement a mis en place une politique pour résorber les bidonvilles, ce qui a été le déclencheur de l’intégration réelle des populations qui y vivaient.
 
Aujourd’hui, les ministères du logement et de l’intérieur travaillent sur un nouveau plan de lutte contre l’habitat indigne. Les cabanes de fortunes et les camps  des plus démunis, dont beaucoup sont issus de la communauté rom en feront partie.
 
C’est la seule solution efficace pour que ces familles puissent sortir de la misère. Pour en finir avec les discours des ignorants qui pensent que vivre dans des taudis est culturel. Pour que la France soit, comme elle l’a toujours été, une terre d’accueil pour tous ceux qui rêvent d’un avenir pour leurs enfants. Pour que l’intégration concerne les roms comme elle a pu concerner d’autres communautés dans le passé.
 
Un pays comme la France qui compte 66 millions de personnes doit pouvoir intégrer 20 000 roms sans peur. Depuis le 1er janvier 2014, les roms peuvent librement travailler en France, et pourtant la menace de « l’appel d’air » brandie ceux qui veulent instrumentaliser la misère à des fins électorales n’a pas eu lieu.
 
La politique proposée par le gouvernement, permettra de mesurer à quel point il n’existe pas de « problème roms », ni de spécificité particulière qui empêcherait tout intégration.
 
Une agglomération comme celle de Nîmes peut accueillir 10 familles de plus représentant en tout 40 personnes sans que cela  n’entraine une instrumentalisation politique et des discours de rejet qui alimentent la haine.
Je continuerai d’œuvrer en lien avec les acteurs locaux et les ministères pour que des solutions durables soient trouvées sereinement et collectivement. 
 
Christophe Cavard
 
Roms NîmesPhotos Dirk Offringa
 

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